Lindt & Sprüngli

(Suisse)

Un chocolatier novateur

Rodolphe Lindt

 

Fils d'un pharmacien, le Suisse bernois Rudolf (Rodolphe) Lindt fit un apprentissage de confiseur chez son parent Charles-Amédée Kohler, puis acheta en 1879, à Berne, deux usines endommagées par le feu, dans le quartier de la Matte (1), et quelques machines démodées. Ainsi naquit sa manufacture de chocolat. Son objectif était de créer un chocolat de meilleures texture et saveur que celui existant alors, sableux, un peu amer et difficile à mouler. Son talent de bricoleur devait l’aider. Une expertise de son frère Auguste, pharmacien de métier, montra qu’il était nécessaire d’extraire, pendant l’affinage, l’excédent de liquide contenu dans la pâte de chocolat, car il cristallisait au contact du sucre. Constatation qui s’accompagna de l’idée que l’adjonction d’un peu de beurre de cacao réduirait la rugosité de la pâte. La mise en pratique de ces observations se fit dans la foulée… La pâte de cacao affinée que Rodolphe Lindt obtint, au terme d’un brassage de soixante-douze heures dans son broyeur à cylindre (2), plus tard baptisé conche, était lisse, d’un brillant satiné, d’un délicieux arôme, fondante en bouche ; de plus, elle se prêtait parfaitement au moulage. Il venait de confectionner le premier chocolat fondant, qui surpassait en qualité tout ce qui avait été produit jusque là. Lindt baptisa sa première tablette Lindt Surfin Chocolat Fondant — elle est aujourd’hui encore fabriquée par Lindt & Sprüngli selon la recette originale, gardée secrète, et commercialisée dans l’emballage que son créateur conçut lui-même. Son succès fut immédiat. Il est amusant de noter que, pour faire rapidement connaître son chocolat fondant hors des frontières du pays, Lindt orienta sa prospection vers les pensionnats de Suisse romande, où les riches jeunes filles venaient, des quatre coins de l’Europe, parfaire leur éducation. Et il se fit là une clientèle assidue…

(1) Au bord de l’Aar, au pied de la cathédrale.

(2) Fruit du hasard ou opération maîtrisée ? Selon certains, lors d’un week-end, Lindt aurait oublié d’arrêter sa machine et aurait eu la surprise, à son retour, le lundi, de découvrir une masse de chocolat d’une texture nouvelle.

(3) Environ 100 millions de francs suisses.

Les chocolatiers européens s’efforcèrent, en vain, de percer la formule de fabrication des tablettes de Rodolphe Lindt. En 1899, celui-ci vendit, pour un million et demi de francs or (3), sa fabrique, son procédé de fabrication et sa marque à la firme zurichoise Chocolat Sprüngli AG. Bien que cette chocolaterie ait eu soin d’enfermer le secret dans un coffre-fort, celui-ci fut dévoilé deux ans plus tard : en 1901, dans la deuxième édition de l’ouvrage de base Die Schokoladen-Fabrikation (Darmstadt), la fabrication de « chocolats fondants » à l’aide de conches était décrite en détail. Lindt était-il au fait de cette révélation imminente lorsqu’il céda son entreprise ? Et s’empressa-t-il de procéder à la vente pour la devancer ? Le mystère demeure…

Quoi qu’il en fût réellement, l’invention de Rodolphe Lindt fut révolutionnaire : un pétrissage à mouvement longitudinal dans une conche(voir ce mot), une ajout de beurre de cacao, que réchauffe la friction générée par le brassage de la pâte, un certain mélange de plusieurs sortes de fèves de cacao. Au cours de ce long affinage, un film de beurre de cacao enrobe les particules de sucre et de cacao, donnant au chocolat son velouté et sa consistance fondante, tandis que l’aération constante permet aux arômes de se développer. Le procédé, dit conchage, reste exploité à ce jour.

De Lindt à Lindt & Sprüngli

 

En 1899, l’entreprise Chocolat Sprüngli S.A., gérée parJohann Rüdolf, acquit la chocolaterie bernoise de Rodolphe Lindt, alors au sommet de son renom. Ainsi naquit L’Aktiengesellschaft Vereinigte Berner und Zürcher Chocoladefabriken Lindt & Sprüngli AG. Tout fut transféré à Kilchberg (canton de Zurich). Rodolphe Lindt devait quitter l’entreprise en 1905.

Dès lors, l’entreprise ne cessa de croître. Vers 1915, elle exportait environ les trois-quarts de sa production dans quelque vingt pays. Certes, cet essor fut freiné par la crise des années 1930 et le second conflit mondial. Mais il reprit dès la guerre finie. La chocolaterie modernisa ses installations ; face à la croissante demande de chocolat, elle dut s’agrandir àKilchberg. Elle signa alors des contrats de licence de fabrication en Italie (1947), en Allemagne (1950) et en France (1954). Elle reprit, en Suisse, les fabriques de chocolat Grison (4) [1961], Nago Nährmittel AG à Olten (1971) et Gubor Schokoladefabrik à Langenthal (1971). C’est en 1972 que le procédé de conchage LSCP,spécifique à Lindt, fut introduit dans la production.Suivirent, sous la gestion de Richard Sprüngli, la prise de participation majoritaire au sein de la société française Perrier (1977), l’implantation en1986enAllemagne, puis aux États-Unis (New Hampshire) et en Italie (1993), les rachats deHof Bauer (Autriche, 1994), Caffarel (Italie, 1997) et Ghirardelli (États-Unis, 1998).

(4) Chocolaterie suisse créée en 1893 par Charles Müller et Karl Bernhardt. Ce fut la première chocolaterie du canton des Grisons – elle reste unique. Elle fut baptisée « Grison » plus tard.

Cette expansion se poursuivit jusqu’à la formation, en 1994, de la holding internationale, Chocoladefabriken Lindt & Sprüngli AG, dont le siège est à Kilchberg. Celle-ci contrôle huit sites de production en Allemagne, en France, en Italie, en Autriche et aux États-Unis. Outre le site de Kilchberg auquel elle est restée fidèle, ce sont : Chocoladefabriken Lindt & Sprüngli GmBH (Aachen, Allemagne), Lindt & Sprüngli SpA (IndunoOlona, Italie), Caffarel SpA (Luserna S.Giovanni, Italie, 1997), Lindt & Sprüngli Ges.m.b.H. (Vienne/Gloggnitz, Autriche), Lindt & Sprüngli Inc. (Stratham NH, États-Unis), Ghirardelli Chocolate Company (San Leandro CA, États-Unis). En France, l’usine d’Oloron Sainte-Marie (Pyrénées-Atlantiques), qui appartenait à Perrier, produisait annuellement entre 25 000 et 30 000 tonnes — c’est, en France, le seul site de production du chocolat Lindt. Devenu un des leaders du marché des chocolats haut de gamme, le groupe Lindt & Sprüngli possédait, en 2006, dix-huit magasins en Suisse alémanique. Il couvre également un réseau mondial de sociétés de distribution. En 2012, il a renforcé sa présence à Shanghai et à Moscou, où il a ouvert de nouvelles sociétés affiliées.

Ses gammes de produits couvrent boîtes d’assortiments, bonbons divers, bâtons-liqueur, bouchées, tablettes, moulages de Pâques, etc. Ses marques sont Caffarel, Fioretto, GhirardelliLindor, Lindt, Nouvelle Confiserie et Swiss Tradition. La marque Lindor couvre divers articles (tablettes, boules, cœurs, carrés, Chocoletti, petits œufs de Pâques, etc.), tous fourrés d’un intérieur de chocolat onctueux et fondant, dont le secret de fabrication reste jalousement gardé. Elle remonte à 1949, lorsque fut créée la première tablette fourrée de ce nom. En 1952 furent lancés les napolitains Lindor, vendus en boîtes ou en étuis. En 1962, la marque fut habillée d’une dentelle blanche, qui allait devenir son signe distinctif. La famille s’enrichit des boules (voir ce mot) en 1967. Au tournant des années 1990 apparurent de nouvelles saveurs : Lindor Noir (1989), Lindor Blanc (1991) et Lindor Noisette (1994). De création plus récente, la gamme de la marque Nouvelle Confiserie est composée de bonbons de chocolat, noir, au lait ou blanc, fourrés de praliné, de cinq goûts différents.

Dans le secteur des tablettes Lindt, la gamme Les Grandes est venue, en 2004, compléter le domaine des tablettes de 150 g : Grandes Amandes Blanc — amandes de Californie torréfiées, accompagnées d’amandes effilées et caramélisées, enrobées de chocolat blanc —, Grandes Noisettes Noir et Grandes Noisettes Lait — noisettes torréfiées, accompagnées de noisettes effilées et caramélisées, enrobées de chocolat noir ou au lait. Conçue au début du troisième millénaire, la collection Excellencedébuta par quatre tablettes de 100 g : Extra Crémeux (chocolat au lait extra crémeux), Noix / Baumnuss (chocolat au lait aux morceaux de noix caramélisés), Éclats de Cacao (chocolat au lait aux éclats de cacao), Délice au Coco (chocolat blanc aux flocons de noix de coco). Suivirent notamment : Noix de Coco Intense (2012), au chocolat noir parsemé de fins copeaux de noix de coco caramélisés ; Fraise Intense (2012), au chocolat blanc enrichi de « délicats éclats de fraises » ; etc. Cette même collection propose aussi des tablettes de chocolat noir « de dégustation » — 60 %, 70 % et 85 % —, provenant de cacaos fins sud-américains, ainsi que des recettes printemps-été et automne-hiver, en édition limitée. La publicité « Quand le chocolat s’empare de vos sens… » mit alors l’accent sur le « voyage sensoriel » auquel invitent la dégustation d’un chocolat, la découverte de « l’alliance ultime de la force et de la finesse, au travers de saveurs intenses, élégantes et racées, et de textures subtiles », et le « plaisir intense et raffiné » qui s’ensuit. Sous cette même dénomination « Excellence » ont été également lancées les tablettes « À la pointe de fleur de sel », « Orange intense », « menthe intense », ainsi que les tablettes au lait (« Extra fondant », etc.). Enfin, la gamme Création décline crème de nougat et éclats croquants enrobés de chocolat au lait, ganache à la crème de marrons enrobée de chocolat au lait, truffe fondante et coulis de menthe enrobés de chocolat noir, fins éclats de meringue enrobés de chocolat noir, etc.

Parallèlement aux tablettes, la marque Lindt couvre divers produits : les « Truffes Intenses », au chocolat noir à différentes teneurs en cacao (70, 85 et 99 %) ; le Lapin Or, lancé en 1952 et devenu l’emblème de Pâques — caractérisé par son habit doré, son ruban rouge et sa clochette, il se décline en Géant lait (500 g), Blanc (200 g), etc. — ; les assortiments ; etc.

La confiserie Sprüngli

 

À l’établissement de la rue du Marché, dans le vieux Zürich, était venue s’ajouter en 1859 une boutique sise sur la Paradeplatz. Le secteur confiserie avait été dissocié de la chocolaterie en 1892 par Rüdolf Sprüngli-Ammann et confié à son fils cadet, Hermann Sprüngli. Il fallut attendre 1956 pour que le fils d’Hermann, Richard, reprît la marque Sprüngli dans sa totalité. La Confiserie Sprüngli transféra sa production à Dietikon en 1961, puis ouvrit plusieurs points de vente dans les années 1970. Sa boutique de la Paradeplatz, transformée en 1909-1910 dans le style Art Nouveau, demeure un des hauts lieux de la gourmandise zurichoise. Son slogan : « Fraîcheur absolue, Mesdames et Messieurs les gourmets ».

L’assortiment de pralinés (bonbons de chocolat) repose sur une longue tradition de qualité. Les truffes Liliput, qui doivent leur nom à leur taille (une boîte de 350 g en compte 49), demeurent un de ses produits phares, avec les VIP, fourrés de ganache au kirsch et au rhum, et le Number One, fourré à la truffe à la crème. Les truffes du jour, commercialisées dans la boutique de laBahnhofstrasse, à Zurich, restent un article recherché. Lancée à la fin des années 1950, à l’initiative de Richard Sprüngli, sa spécialité pâtissière, les Luxemburgerli, est devenue emblématique. Ces petits macarons en « baisers », aux fruits, à la ganache, ou à la crème au beurre, comportent une variété au chocolat, au milieu d’une gamme de plus de trente arômes. Ils devraient leur nom à un jeune confiseur du Luxembourg dont les propriétaires étaient amis de la famille Sprüngli et qui vint parfaire sa formation à Zurich. Il débuta la fabrication à la main de la spécialité de son maître d’apprentissage luxembourgeois, laquelle fut alors baptisée « petit Luxemburgerli ».

La publicité

 

1938.

Atelier Paul Otto Althaus, vers 1930, 128 x 90,5 cm.

Albert Bütschi, 1940, 128 x 90,5 cm.

Steinmann & Bolliger, Zürich, 1945, 128 x 90,5 cm.

Paul Otto Althaus, 1939, 128 x 90 cm.

Emil Ebner, 1951, 127 x 90 cm.

Fillios, 1956, coll. A. P.-R.

Emil Ebner, ca 1953, 90 x 128 cm.

Adolf Wirz AG, Zürich, vers 1970, 128 x 90,5 cm.

Ca 1970, 128 x 90,5 cm.

Anon., phot. Max Roth, 1966-1968, 70 x 49,5 cm.

Emil Ebner, 1951, 128 x 90,5 cm.

Emil Ebner, 1953, 128 x 90,5 cm..

Vers 1980, 128 x 90,5 cm.

Vers 1980, 128 x 90,5 cm.

Ca 1970, 128 x 90,5 cm.

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